PROCÈS HABRE - PLAIDOIRIE DES AVOCATS DES PARTIES CIVILES : ON ATTENDAIT DES PREUVES, ON A EU UNE SÉANCE DE REPRISE DES ACCUSATIONS ET DE SIMPLES CONSTRUCTIONS THÉORIQUES.

Six avocats des parties civiles, en cette première journée, ont défilé à la barre pour présenter leurs plaidoiries. Tout d’abord, Me Yaré Fall s’est ému des commentaires des avocats de Habré qui critiquaient les CAE qu’il a considéré comme étant une institution de la République du Sénégal ! Les CAE seraient comme le drapeau du Sénégal ! Diable ! A coups sûrs, le Procureur Mbacke Fall ne serait pas d’accord avec l’avocat Yaré Fall, défenseur d’Oumar DEBY ITNO, les CAE revendiquant haut et fort le statut d’une juridiction internationale ayant même un statut diplomatique. En outre, sous le coup de l’émotion, l’avocat a oublié que les CAE sont financées à 100% par des fonds étrangers. Imaginez une institution de la République du Sénégal dirigée par un étranger et fonctionnant avec des fonds étrangers. Que deviendrait la souveraineté du pays ? Donc, il est préférable de savoir raison garder et de cesser les attaques ethniques et racistes contre le Président Habré en faisant référence à sa tenue vestimentaire..

Puis, ce fut Me Delphine Djiraibe, elle aussi, développant un registre tribaliste, "la guerre du Nord" déclarera t-elle. De manière générale, tous les avocats des parties civiles, Moudeina, Philippe Houssiné et les autres qui ont présenté leurs plaidoiries, n’ont pas accompli leur mission en cette occasion.
Le Droit Pénal est le Droit des certitudes, dit -on, et, ne peut faire place à des rumeurs, des ouï dire, des reprises de témoignages eux-mêmes non prouvés, des affirmations gratuites. Se contenter de reprendre les déclarations des plaignants, sans les avoir au préalable prouvées, pour en déduire que preuve a été apportée, est une grosse plaisanterie.
Plusieurs avocats des Parties Civiles ont cité les dépositions devant la Commission de DEBY, des anciens directeurs de la DDS.

Pourquoi ces anciens directeurs de la DDS n’ont-ils pas été auditionnés par les juges d’Instruction des CAE lors des Commissions Rogatoires ?
Tout d’abord, les juges ont souhaité leur transfert à Dakar, refus catégorique d’Idriss Deby, puis, ils ont exprimé la volonté de les entendre, le régime DEBY s’y est opposé, ensuite les juges ont voulu leur envoyer des questions par commissions rogatoires, nouveau refus de DEBY. Enfin, les juges des CAE ont demandé de les questionner par visio-conférence nouveau refus catégorique du gouvernement tchadien.

Autre chose, malgré toute cette peur du régime DEBY, on peut relever pour le souligner avec force que toutes les fiches et compte-rendus présentés par la Commission d’enquête de DEBY dirigée par Mahamat Hassan Abakar et portant sur les déclarations des anciens directeurs de la DDS, citées ce matin par l’ensemble des avocats des parties civiles, ne portent aucune signature de ces personnes. Quel crédit accordé à ces grossières manipulations ?

Sur le plan de la procédure pénale, ce sont des chiffons à jeter à la poubelle tout simplement.

L’équipe HRW en appui à Moudeina, a présenté des schémas des services de sécurité mettant au centre le Président Habré entouré des noms des anciens directeurs de la DDS pour nous expliquer qu’il était au centre de tout, dirigeait tout, savait tout et est donc responsable de tout. Remarque très pertinente d’un jeune sénégalais dans la salle.

Où sont donc tous ces anciens responsables qui l’entouraient hier, ils devraient être aussi autour de lui dans cette salle ? Rappel simple d’un des plus grands principes du procès équitable. La simplification grotesque et caricaturale du soit disant organigramme révèle l’omission volontaire de la position de Deby dans celui-ci.

Ainsi donc, cette première journée de plaidoirie a vu des avocats des parties civiles buter sur les faiblesses insurmontables de leur dossier d’accusation. Les règles substantielles de la procédure pénale encadrent rigoureusement les conditions d’admission des preuves qui doivent se concilier avec les principes généraux du Droit et le respect des droits de la défense. Les exigences de légalité et de régularité des éléments de preuve sont, à ce point, importantes pour le juge pénal qu’il en contrôle systématiquement les conditions et les circonstances de leur obtention. Que vont devenir de simples comptes-rendus d’une commission non indépendante et à la solde du pouvoir Deby ? Avec comme circonstances aggravantes, le refus catégorique des autorités tchadiennes de laisser s’exprimer les personnes faisant l’objet de compte rendus, devant les juges d’instruction des CAE sur des PV signés et respectant toutes les conditions de légalité comme l’exige la loi.

Par Me François SERRES