INTERVIEW DE ME DIAWARA SUR LA CONVOCATION DE MME TOURE PAR LA COUR D’APPEL SUR LE FAUX

Question 1 : Maître, l’affaire de la fausse procuration impliquant Mme Aminata Touré a rebondi avec son examen par la Cour d’Appel le 18 Avril, votre confrère assurant la défense de Mme Touré parle d’un "enrôlement en appel avec une diligence particulière" selon ses propres termes. Votre réaction ?

Lors du premier jugement, le tribunal s’est déclaré incompétent, au profit de la Haute Cour de Justice sur le seul motif que le faux est daté du 22 Août 2012 période où Mme Touré était ministre de la Justice.
Nous avons alors fait appel, parce que nous estimons que la compétence de la Cour de justice de la République, selon la Constitution, est limitée aux actes constituant des crimes ou délits commis par des ministres dans l’exercice de leurs fonctions et qui ont un rapport direct avec la conduite des affaires de l’Etat, relevant de leurs attributions ; elle ne s’étend pas aux faits commis à l’occasion de l’exercice d’une activité ministérielle. ».
Il est dès lors manifeste que les faits reprochés (faux et usage de faux) à Madame Touré ne relèvent pas de l’exercice des fonctions et n’ont aucun rapport direct avec la conduite des affaires de l’Etat relevant de ses attributions.

En introduisant cet appel, nous avons exercé un droit reconnu à tous dans un État de droit. Je précise que cet appel a été introduit le 17 avril 2015. Et si la Cour d’appel l’examine le 18 avril 2016, nous sommes exactement dans le temps judiciaire connu de tous. Où est la diligence particulière ? Soyons sérieux ! Parlons vrai de nature à éclairer l’opinion et ne pas la manipuler ou la tromper malicieusement.

Restons dans le cadre de ce qui est reproché à Mme Aminata Touré : « fabrication de faux et usage de faux. Rappelez-vous, elle a produit un document prétendument signé par l’ancien ministre des Affaires Étrangères Maître Alioune Badara Cissé, qui a pris ses responsabilités et éclairé l’opinion nationale et internationale à travers un communiqué officiel :"je n’ai pas signé ce document ". C’est très grave pour Mme Touré. En principe, le Procureur de la République devrait ouvrir une enquête pour situer les responsabilités.

Question 2 : La défense de Mme Touré a renchérit en parlant d’une volonté de "détruire politiquement" leur cliente, de "motifs inavoués" et "d’hommes politiques cachés derrière cette procédure".

Effectivement, on a vu beaucoup d’émotions, de panique et des accusations farfelues. Je remarque aussi que pour la défense de Mme Touré : "engager des poursuites judiciaires contre une personne, c’est contribuer à la détruire politiquement.". C’est exactement ce qu’elle a fait contre le Président Habré. Comme on dit, on a peur que de ce que l’on a fait.
La communication de Mme Touré a construit une image d’elle la présentant comme une femme courageuse ; dans ce cas, peut-elle nous décliner l’identité de ces hommes politiques dont il est fait allusion et qui seraient de connivence avec le Président Habré en prison depuis bientôt 3 ans et ses avocats ?
Une femme politique, de surcroît ex- ministre de la Justice, Garde des sceaux qui déclare publiquement qu’elle ne répondra absolument pas à une convocation de la Justice est un contre-exemple pour l’ensemble des citoyens dans un Etat de Droit où la Justice a pour mission d’apporter des réponses aux conflits qui opposent les personnes, et la femme politique qu’elle est, devrait adopter une posture de respect et non d’arrogance et de défi envers les institutions républicaines du pays.

Question 3 : Vous êtes optimiste par rapport à cette nouvelle phase ?

Nous avons un dossier solide, c’est pourquoi nous sommes sereins, et nous travaillons plus que nous communiquons à torts et à travers comme certains qui usent et abusent de la manipulation.

Source : Le Populaire du 16-17 avril 2016